La jurisprudence récente du Conseil d’État (25 mai 2018, 7e – 2e chambres réunies n°417428 & 417439), publiée au recueil Lebon a souligné que le contrôle du juge sur le contenu des lots d’un marché public était restreint, laissant une grande marge d’appréciation à l’acheteur.
Dans cet arrêt, l’OPH « Hauts-de-Seine Habitat » et la « Sté Eiffage » ont déposé des pourvois contre l’ordonnance du juge du référé précontractuel, qui annulait la passation du marché public, après requête d’un candidat évincé, pour ne pas avoir procédé à l’allotissement du marché.
La Cour estime que, saisi d’un moyen tiré de l’irrégularité de la décision de ne pas allotir un marché et de recourir alors à un marché global, il appartient au juge du référé précontractuel de déterminer si l’analyse à laquelle le pouvoir adjudicateur a procédé et les justifications qu’il fournit ne sont pas entachées d’appréciations erronées (eu égard à la marge d’appréciation dont il dispose pour décider de ne pas allotir lorsque la dévolution en lots séparés présente l’un des inconvénients prévu par l’article 32 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015).
Par ailleurs, lorsqu’un marché public a été alloti, par ex. en lots géographiques, le juge ne peut relever un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence du fait de la définition du nombre et de la consistance des lots, que si celle-ci est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation, compte tenu de la liberté de choix dont le pouvoir adjudicateur dispose en ce domaine.
Le juge des référés doit, en plus, même si le marché litigieux ne respecte pas le principe d’allotissement, avertir les parties de son intention d’annuler la procédure de passation dans son intégralité.
En l’espèce, les juges suprêmes ont donné raison aux justifications fournies par le maître d’ouvrage. L’allotissement risquait de rendre l’exécution du marché plus difficile techniquement et plus chère, étant donné la multitude de bâtiments, pour lesquels des travaux étaient envisagés, ainsi que les conditions techniques d’exécution, c’est-à-dire sans interruption du fonctionnement de l’établissement scolaire et avec des obligations élevées de sécurisation du chantier et des accès.
Par conséquent, la décision du pouvoir adjudicateur de ne pas allotir n’était pas «entachée d’une appréciation erronée».
Le juge ajoute qu’étant donnée cette liberté de choix de l’acheteur ; le pouvoir du contrôle du juge sur les garanties professionnelles, techniques et financières des candidats, est également restreint ; le juge des référés pouvant seulement censurer une appréciation du pouvoir adjudicateur entachée d’une erreur manifeste.
En la matière, le Conseil d’État estime que la personne publique avait écarté à juste titre la candidature du requérant, puisque il n’avait pas fait preuve de ses capacités à exécuter le marché.
En conséquence, il décide d’annuler l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise et de rejeter la demande du groupement requérant devant le juge des référés.
Plus d’informations : Vassiliki Vareltzi / b.valloire@syntec-ingenierie.fr