Grand Paris Express : “Faisons confiance à l’ingénierie française” – la tribune de Syntec-Ingénierie sur Les Échos

Suite au rapport de la Cour des Comptes sur le Grand Paris Express, Syntec-Ingénierie a publié une tribune sur le site des Echos.

Grand Paris Express : faisons confiance à l’ingénierie française

Dans son récent rapport sur le Grand Paris Express, la Cour des comptes semble vouloir revenir à une ingénierie d’État.

Le rapport de la Cour des comptes sur le Grand Paris Express comporte son lot de critiques, c’est la loi du genre. Puisse-t-il aider les pouvoirs publics à prendre leurs décisions sur le rythme de réalisation des lignes et sur la gouvernance, sans sacrifier un projet fondamental pour la société et pour l’économie française.

La profession de l’ingénierie, quant à elle, est mobilisée pour mener le projet, l’optimiser selon les orientations des pouvoirs publics et en faire une réussite pour les populations franciliennes. Il semble toutefois, à la lecture de certains passages, que la haute juridiction financière veuille revenir à une ingénierie d’État.

Une équipe réduite

Bien sûr, la Société du Grand Paris doit être délivrée de contraintes tatillonnes sur la gestion de son personnel qui nuisent à la bonne conduite du projet. Mais la solution pour le Grand Paris Express n’est pas d’augmenter encore et toujours l’effectif de cette société de projet : elle doit rester agile et se transformer en permanence pour s’adapter au phasage des travaux. Les compétences nécessaires sont différentes selon les phases du projet. Intégrer tous les acteurs du projet dans un établissement public n’améliorerait en rien l’efficacité.

C’est exactement l’erreur qu’a commise Crossrail à Londres en absorbant progressivement toute l’équipe d’ingénierie privée (une alliance internationale menée par Bechtel, l’un des champions mondiaux des grands projets) mais, en fait, elle n’en a absorbé que les ingénieurs de premier niveau, se privant du management et des chefs de projet qui maintenant participent avec succès à la construction du métro de Riyad.

Celui-ci est d’une taille très comparable à celle du Grand Paris Express. Mais sa construction se déroule en six ans et elle est pilotée par une agence, l’ADA, qui ne mobilise que 45 personnes pour le projet. Le métro de Doha, le métro d’Ahmedabad ou encore le TGV Kuala-Lumpur/Singapour sont pilotés par des équipes aussi réduites. Sommes-nous donc les seuls au monde à ne pas faire confiance à l’ingénierie française qui intervient dans la construction de la quasi-totalité des réseaux de métros du Moyen-Orient, d’Afrique et d’Inde ?

Réputation internationale

La France semble parfois s’ingénier à ignorer ses propres enfants. L’ingénierie française a une réputation internationale inégalée et tout ce qu’on trouve à dire c’est que nous serions bien nombreux pour mener un projet, certes ambitieux, mais comparable aux métros de Riyad, Delhi ou à l’extension de celui de Singapour.

Laissons nos ingénieurs travailler, aidons-les en prenant des arbitrages courageux en temps utile. C’est le rôle du politique qui doit le faire à travers une société de maîtrise d’ouvrage comme la Société du Grand Paris. Aidons-la à se concentrer sur cette mission d’arbitrage et de priorisation.

Nous vivons sur tous nos projets cette phase de doute au milieu du gué. Les ingénieurs de France qui ont construit nos autoroutes, nos métros, nos tramways, nos LGV, nos barrages, nos stations d’épuration, nos canaux, nos ponts, nos tunnels… auront l’intelligence collective pour trouver les optimisations de coûts et de délais répondant aux orientations politiques qui seront arrêtées.

Nicolas Jachiet, président de Syntec-Ingénierie